Chevalerie et christianisme aux XIIe et XIIIe siècles

Chevalerie et christianisme aux XIIe et XIIIe siècles


Aurell Martin (sous la direction), Girbea Catalina (sous la direction)

La chevalerie présente deux acceptions, l’une sociale et l’autre idéologique. D’une part, le groupe aristocratique des combattants à cheval, et d’autre part les valeurs qui lui imposent des comportements spécifiques. Devons-nous la mêler inextricablement au christianisme ? Les penseurs des XIIe et XIIIe siècles justifient la prépondérance sociale des chevaliers par le péché d’Adam et la rupture de l’harmonie originelle qu’il entraîne. Ils considèrent que les miles – « élu parmi mille », selon l’étymologie d’Isidore de Séville – ont pour vocation divine de défendre le faible et de faire régner la justice, instaurant par les armes la paix. Cette théologie politique marque l’évolution de l’adoubement, qui emprunte alors à l’onction royale et aux sacrements chrétiens bien des éléments de son rituel. En recevant l’épée, dûment bénie, et la colée, le nouveau chevalier intègre un ordre, tout comme le clerc est ordonné. La prédication lui rappelle les devoirs spécifiques de l’état qu’il vient d’adopter, en particulier de mitiger sa violence et d’exercer sa puissance avec droiture et modération. Elle l’encourage à partir en croisade pour défendre la Chrétienté.

Jusqu’aux années 1990, dans leurs analyses sur la chevalerie, les historiens ont repris la trame du discours normatif des clercs, que nous venons brièvement de présenter. Ils ont tenu pour vraisemblable l’influence extérieure de l’Église dans la mitigation de la violence nobiliaire, grâce à l’influence sur le code chevaleresque de la Paix de Dieu et plus largement du message évangélique. Depuis les vingt dernières années, d’autres spécialistes remettent en cause ce modèle, remarquant la nature idéale des discours des clercs médiévaux sur la chevalerie, qu’il conviendrait de déconstruire. Ils adoptent l’anthropologie culturelle pour méthode afin de conclure que, tout au long du Moyen Âge et de façon endogène, la société guerrière produit ses propres codes de conduite pour épargner les vies de ses membres dans les combats, pour augmenter son honneur et pour affirmer sa domination sur la paysannerie. Toute superficielle, la religiosité des chevaliers ne serait donc pour rien dans l’autocontrôle de leur violence. Le débat apparaît en toile de fond du présent ouvrage, où les meilleurs spécialistes de la question se penchent sur les rapports complexes et paradoxaux entre le christianisme et les guerriers nobiliaires. Ils analysent ainsi autant la piété chevaleresque que la part de l’Église dans la guerre menée par l’aristocratie au cours d’une période charnière, où les normes, mentalités et conduites connaissent de profonds bouleversements.

Avec le soutien de l'université de Poitiers

Version Papier
Disponible
22,00 €
Version numérique e-pub
Disponible
10,99 €
Date de parution : 15/12/2011
Collection : Histoire
EAN : 9782753517264
Nb de pages : 324

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  • Sommaire

    Piétés chevaleresques

    • Les chevaliers dans les cartulaires monastiques de la région parisienne
    • La notion de Miles christi dans la spiritualité occidentale aux XIIe et XIIIe siècles 
    • Choix nobiliaires ou modèle oriental : le cas de saint Georges et des autres saints guerriers
    • Le geste efficace : le don du chevalier au saint sur le tympan de Mervilliers (XIIe siècle)
    • La spiritualité de Philippe de Remy, bailli capétien, poète et seigneur de Beaumanoir

    Paradoxes et compromis : les tensions entre Église et chevalerie

    • L’Église et les premiers tournois ( XIe et XIIe siècles) 
    • Les chevaliers face à la mort soudaine et brutale : l’indispensable secours de l’Église ?
    • Chevalerie, adoubement et conversion dans quelques romans du Graal 
    • Piety and Independence in Chivalric Religion
    • L’héraldisation du sacré aux XIIe- XIIIe siècles. Une mise en scène de la religion chevaleresque ?

    Guerre et christianisme

    • Christian Warriors and the Enslavement of Fellow Christians 
    • Le sens de la mort de Roland dans la littérature des XIIe et XIIIe siècles (chanson de roland, chronique de turpin, chronique rimée de Philippe Mousket)
    • La chevalerie célestielle et son utilisation idéologique dans les sources de la Première croisade : autour de la bataille d’Antioche (28 juin 1098)
    • Les guerres des ordres militaires furent-elles des guerres chevaleresques ? L’exemple de la conquête de la Prusse par l’ordre teutonique (1230-1283)
  • Auteur(s)
  • Fiche technique
  • Introduction, table des matières, 4e de couverture et autres documents