Les lieux du bonheur
Approches littéraires
Le bonheur en littérature ? Le bonheur, en tant qu’état de l’âme, peut emprunter à diverses représentations s’exprimant à travers une terminologie labile (eudémonisme, bien-être, joie de vivre, etc.) ; il peut être présenté aussi bien comme un projet de vie, un idéal, construit et pensé dans un cadre philosophique ou spirituel, que comme un état de fait, une expérience existentielle ressentie et vécue dans son immédiateté et sa dimension émotionnelle. Éphémère ou durable, il se vit dans l’intimité subjective comme dans le partage. On se propose de penser sa matérialisation ou sa réalisation à travers les lieux que l’écriture et la littérature peuvent susciter.
Plusieurs perspectives sont posées dans cet ouvrage pour tenter de répondre à cette question : que fait la littérature au bonheur ? On y interroge d’abord la manière dont la fiction inscrit le bonheur dans une quête, une trajectoire spirituelle, voire mystique, dans un ailleurs qu’offre parfois la perspective d’une migration. On peut aussi rapporter la dimension intérieure du bonheur comme état de l’âme à un objet extérieur, « le lieu construit » imaginé, en privilégiant les relations et interactions qu’il entretient avec les contextes de sa réalisation.
Les « lieux du bonheur » invitent encore à considérer le concept, non seulement dans sa dimension subjective et individuelle, mais encore au sein de représentations où le bonheur est pensé comme collectif, voire communautariste. Les genres littéraires, comme le récit allégorique, l’autobiographie, l’autofiction, les journaux intimes et les mémoires, le roman notamment où la dimension fictionnelle peut développer la matérialisation d’un bonheur collectif, entre utopies et dystopies, ou encore le théâtre, ont à voir avec cette articulation.
Enfin, il importe de considérer l’objet-livre comme lieu construit par l’acte même de l’écriture, un refuge pour l’auteur/l’autrice, pour le lecteur/la lectrice, favorisant certaines formes de bonheur : la littérature où l’on se « recueille », l’objet-livre qui peut encore être le lieu d’un engagement, volontariste et politique.
Cette perspective de l’engagement renvoie au rôle que la littérature occupe au sein de la société, en tant qu’elle constitue elle-même un lieu à part entière – une scène – où peuvent se jouer et s’exprimer les conflits, aspirations ou grandes questions qui occupent le corps social dans le temps présent comme dans le temps long de l’imaginaire partagé.
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